Réforme des collectivités : l’état du projet
Cela tousse même dans la majorité parlementaire, je ne
parle même pas de l’opposition ! Le projet est aujourd’hui de plus en plus
attaqué. Fillon attend avec appréhension sa visite au congrès de l’AMF… Déjà,
il s’était fait chahuté l’année dernière… Cette année, cela risque d’être
le lynchage aux dires de nombreux maires. La seule alternative de Fillon,
attraper la grippe A d’ici la mi-novembre…
Et pourtant, l’Etat a déjà édulcoré son texte. Quand on
compare l’avant-projet sommaire et le projet déposé au Sénat le 21 octobre, la
copie a été largement réécrite. La métropole ne sera plus une collectivité, le
nombre de compétences départementales et régionales transférées obligatoirement
ont été revues à la baisse, la plupart étant transférables qu’à condition d’un
accord avec ces collectivités. Bref, si le département y perd, il est loin de
disparaître… et la région ne sort pas renforcée. Pour ce qui est de la clause
générale de compétence, le texte final est de moins en moins clair, un pur
bonheur pour la glose doctrinale dans les facs de droit…
Il n’en reste pas moins des clivages importants :
1/ Sur la méthode : comment demander de voter un
texte de ce type sans connaître les recettes des collectivités et leurs
compétences ? La réforme de la TP est loin d’être rassurante de ce point
de vue-là puisque c’est quand même le noir complet sur les conséquences
financières de cette réforme après 2012 (l’Etat s’étant engagé à compenser les
manques à gagner en 2010 et 2011). Pour les compétences, on ne voit rien venir
actuellement.
2/ Sur la réforme de l’intercommunalité : les règles
changent radicalement avec des règles de majorité qui passent, pour la prise en
charge de compétences ou la définition de l’intérêt communautaire, des 2/3 à
50%. Par ailleurs, entre 2012 et 2014, les préfets obtiennent des pouvoirs
exorbitants, puisqu’en 2013 ils peuvent imposer des périmètres, il en est de
même pour les communes isolées en 2014.
3/ Sur les conseillers territoriaux, c’est l’émeute.
D’une part, les régions sont opposées au retour à une élection très
majoritairement à l’échelle départementale. Les départements n’y sont pas
favorables parce que le redécoupage cantonal se fera sans l’avis du département
(sic !) et que certains départements, puisqu’il s’agit aussi d’élire aussi
des élus régionaux risquent d’être à la portion congrue. En effet, il va
falloir faire un découpage cohérent en termes de représentation géographique
entre les différents départements. Dans cette hypothèse, combien la Lozère aura
de conseillers territoriaux ? Une poignée, comparativement à l’Hérault. Il
en sera de même dans l’Aude. Jusque-là, on rajoutait des cantons pour intégrer
les évolutions démographiques. Désormais, on va fusionner des cantons. Fini les
cantons de la Salvetat ou du Caylar…
Enfin, je ne parle même pas du devenir de la parité dans les futures
régions, parité qui sera réduite à la portion congrue.
4/ En creux, deux interrogations
majeures existent. D’une part, le devenir du monde rural, c’est-à-dire la
majorité du territoire qui s’interroge massivement sur son devenir financier et
institutionnel. Cette réforme rappelle en effet furieusement les projets de la
DATAR des années 70 quand on parlait des métropoles d’équilibre… On renforce les
pôles urbains, pourquoi pas après tout, ce n’est pas totalement idiot, mais on
fait quand même l’impasse sur le reste. Par ailleurs, l’autre débat, à mon avis
plus structurant, c’est la volonté de l’Etat de réduire le périmètre du service
public, en asséchant les capacités d’intervention des communes… On comprend
qu’effectivement le malaise est profond, à gauche…mais aussi à droite.